est l'un des protagonistes du théâtre de marionnettes d’Émilie-Romagne. Aujourd’hui encore, il fait partie du répertoire traditionnel des compagnies de cette région.
Il a été créé au début du XIXème siècle par le marionnettiste de Modène Luigi Rimini Campogalliani. Selon une anecdote sur l'origine de Sandrone, Luigi se serait inspiré du père d'un chanteur aveugle qui participait avec lui aux tournées : l’homme s’appelait Alessandrino, il était agriculteur de métier, et une des particularités de son caractère était de vouloir parler italien alors qu’il ne connaissait que le dialecte en usage dans les campagnes.
Ainsi, les maladresses linguistiques d'Alessandrino devinrent l’occasion de représenter un personnage populaire et largement répandu dans les provinces émiliennes – en particulier celles de Modène, Reggio Emilia, Parme, Piacenza et Bologne, mais aussi en Romagne et dans les régions environnantes.
Sandrone est donc devenu une caricature de l'agriculteur de Modène : simple d’esprit au bon cœur, inculte et grossier, robuste et résistant à la fatigue. Incapable de s’exprimer en italien, il emploie des mots difficiles ou issus du dialecte, s’attirant les plaisanteries de ses compagnons d’aventure et l'hilarité du public.
qui forme avec lui un couple s’inscrivant dans la plus classique tradition théâtrale, très proche du couple français constitué par Guignol et Gnafron. Sandrone est victime de tromperies, dans lesquelles il tombe en raison de sa naïveté, et dont il se sort en général (souvent avec l'aide de Fagiolino). Sandrone a tendance à faire confiance à ceux dont il devrait se méfier, mais en même temps son pragmatisme rural l’aide à résoudre les situations. Bien qu’il s’agisse des dynamiques comportementales les plus typiques du personnage, celles-ci peuvent changer en fonction du lieu, du moment et de la culture dans laquelle il est présenté, se teintant de nuances et de personnalités complexes et variables : l’ingénuité peut devenir ruse, la peur, audace.
Comme Fagiolino, Gioppino, Sganapino et d’autres personnages nés dans le castelet de marionnettes, Sandrone est considéré comme un «masque sans masque », à savoir un personnage aux caractéristiques reconnaissables, comme une expression du visage, un vêtement aux couleurs déterminées, qui le rapprochent des nombreux masques de la Commedia dell’arte issus du théâtre d’acteurs entre la fin du XVIème et du XVIIIème siècles.
Ce qui le distingue davantage de ces derniers est, précisément, l'absence de masque sur son visage. Cet accessoire est désormais inutile pour les personnages. Leur masque est l'expression même de leur visage, sculpté directement dans le bois.
Sandrone est un vieil agriculteur dont le visage porte les marques de l’âge, du dur labeur dans les champs, de la faim et de la passion pour le vin (en particulier le Lambrusco). L'expression de son visage est celle d'un homme grossier, colérique, négligé. Les exemplaires les plus anciens de Sandrone montrent que son aspect fruste et sauvage s’est progressivement renforcé au fil du temps : initialement la bouche souriait presque et montrait toutes ses dent, au fil du temps elle est devenue grande ouverte et édentée.
Sandrone a une famille, la famille Pavironica (de Pavera, herbe des marais avec laquelle, on empaillait les chaises et réalisait des nattes et des chapeaux). Elle est composée de son épouse, la Polonia (Apolline) et de son fils Sgorghìguelo (dans certaines provinces, il est appelé Zuchetto – “calotte”). Malgré des rapports durs et querelleurs, Sandrone révèle souvent son amour pour la Polonia, qu’il appelle tendrement, avec des paroles paysannes comme “petite poule!”
Le fils est encore plus stupide et naïf que son père. Malgré son intelligence limitée, il veut tout savoir et martèle Sandrone de questions fréquentes, précises et insensées.
La popularité de Sandrone s’est tellement répandue en Émilie-Romagne qu’il a donné naissance au qualificatif destiné aux personnes naïves ou étourdies. Le surnom Sandrone n’est jamais utilisé avec méchanceté, il s’agit plutôt d’une marque d’affection, égale à celle du public pour cette figure du théâtre populaire.